Suffit-il de ne pas parler d’un phénomène pour qu’il ne survienne pas et est-il bien responsable d’utiliser un concept qui, apparemment, n’est en rien le reflet de la réalité sociale de notre pays (1) ? Pour certains, décrire les modes de privatisation de la protection sociale en Belgique, voire en Europe, c’est crier au loup alors qu’il est bien terré dans une forêt lointaine et profonde et ce serait inciter les citoyens à recourir à des assurances privées pour anticiper la dislocation de la sécurité sociale. Nous ne sommes pas de cet avis, nous pensons que la privatisation est à l’œuvre bien avant que quiconque n’ose prononcer son nom.


Nous la subissons, implicitement, un peu plus chaque jour quand les impôts et les cotisations sociales diminuent et que les dépenses publiques se réduisent. Il s’agit bien plus que d’un débat sémantique, c’est la cohésion sociale qui est en jeu et poser un diagnostic sans complaisance de la maladie est une étape indispensable pour élaborer les thérapies qui garantiront la pérennité de notre système solidaire.
Après la crise de 1929 et jusqu’au début des années 70, l’État ne fut guère contesté dans son rôle de régulateur de la vie économique et sociale. Mais les tenants du libéralisme allaient bientôt opérer une contre-révolution dont les effets se feraient sentir jusque dans les pays dotés traditionnellement d’une solide et longue expérience de solidarité collective. Après avoir été tous keynésiens, les responsables politiques deviennent tous libéraux ou, en tout cas, adoptent des mesures fondées sur le consensus implicite qu’une politique de marché est la seule politique possible (2). Le processus est arrivé à maturité et l’échec des économies planifiées n’a pas seulement fait disparaître l’ennemi conventionnel, il a aussi amené sur un plateau d’argent la confirmation que l’économie de marché était l’unique façon d’apporter la prospérité et donc le bonheur sur terre. Les États-Unis furent, et restent, des exemples de réussite d’une mixture politique qui privilégie la responsabilité individuelle et l’initiative privée et peu de voix se sont fait entendre pour contester l’idée selon laquelle la recherche du profit maximum au niveau individuel ne pouvait que générer un surplus de bien-être collectif.
On ne s’étonnera pas, par exemple, que les libertariens, pourfendeurs de l’État, aient élu résidence aux États-Unis. C’est aussi aux États-Unis que l’on retrouve de grands théoriciens libéraux qui se sont également employés à faire appliquer leurs recettes en prodiguant des conseils de politique économique à des pays d’Amérique du Sud. Milton Friedman titrait en janvier 2003 un article du journal Le Monde par « Baisses d’impôts = gouvernement modeste », il y jugeait souhaitable cette modestie et estimait que les réductions de recettes s’accompagneraient inévitablement de réductions de dépenses, signe du retrait progressif de l’État (3). C’est d’ailleurs ce que reproche Joseph Stiglitz (4) qui, bien qu’Américain, s’oppose en termes de plus en plus clairs à ce que Paul Krugman appelle « les affameurs de la bête » (5).
C’est ainsi que la plupart des pays se sont engagés dans des réformes fiscales dont le but unique était de réduire les taux d’imposition présentés comme des inhibiteurs de l’activité économique. Toutes les mesures prises se fondaient sur une croyance presque universelle qui reconnaît à l’individu une seule motivation, un seul mode d’incitation à dépasser son penchant naturel à l’inertie : l’argent. Les réductions des taux marginaux les plus élevés ont alors été accompagnées de l’introduction de déductions fiscales diverses. Les mêmes recettes ont été appliquées pour toutes les questions qui se posaient aux décideurs politiques, les incitants fiscaux pouvaient aussi bien favoriser le travail rémunéré des femmes, les pensions complémentaires, le capital à risque ou l’adoption d’une meilleure isolation lors de la rénovation d’une habitation.
C’est la même logique qui prédomine lorsqu’on réduit les cotisations sociales afin de relancer l’emploi. Selon les patrons, l’efficacité de cette mesure est telle qu’elle s’autofinance, c’est-à-dire que les réductions en questions génèrent suffisamment d’emplois pour que les recettes fiscales et parafiscales qui les accompagnent restaurent l’équilibre financier de l’État et de la sécurité sociale. L’observateur attentif sait cependant qu’aucune évaluation sérieuse de ces mesures ne conclut à une telle efficacité (cf. encadré ci-dessous). On reste donc dans le domaine des convictions et de l’idéologie ou tout simplement de la mauvaise foi lorsque l’agenda caché consiste à amoindrir les capacités financières d’un État qui n’a alors d’autre choix que de se désengager. C’est en cela que nous osons parler de complot néolibéral et selon nous, lorsque l’État se prive volontairement de ses ressources, il entre déjà dans un processus de privatisation qui est d’autant plus pernicieux qu’il est, à ce stade, totalement implicite.

Des réformes inquiétantes en Europe
Ce complot ne peut aboutir que s’il bénéficie d’un contexte favorable, d’un terrain propice qui engage l’État sur une voie à sens unique, voire sans issue. Ce contexte, c’est la globalisation de l’économie, l’interdépendance universelle des nations dont parlaient déjà Marx et Engels dans leur Manifeste du Parti communiste (6). Au nom de cette interdépendance il n’est point de salut hors nivellement par le bas des taux d’imposition et de cotisations sociales. Comment en effet lutter contre la mobilité croissante des capitaux, des investissements et de la main-d’œuvre qualifiée ? Et si cette main-d’œuvre ne se déplace pas, les financiers qui sont devenus les nouveaux capitaines d’entreprise décident de délocaliser leurs productions. Sous l’effet de la révolution informatique, des tâches très sophistiquées sont effectuées par des spécialistes de pays en voie de développement, aussi compétents mais moins payés que leurs concurrents occidentaux. Enfin, si l’idée de laisser filer le déficit budgétaire venait à quelque chef de gouvernement européen, il lui serait rappelé l’incontournable respect d’un pacte de stabilité qui justifiera merveilleusement les réductions de dépenses publiques (7).
Ces réductions, qui sont toutes des formes implicites de privatisation, touchent la plupart des domaines de l’intervention étatique. La protection sociale est directement et fortement touchée par les mesures d’assainissement. C’est du moins ainsi qu’elles sont présentées mais elles consistent surtout à reporter sur les assurés, voire les assistés, des charges financières croissantes. Au Pays-Bas, dès 2006, une assurance obligatoire pour tous verra le jour mais le « périmètre de soins » concernés n’est pas encore connu (8). Le nouveau système fait la part belle à la concurrence entre les organismes assureurs et au développement des assurances complémentaires libres, il introduit également le système de « bonus » qui prévoit que les assurés particulièrement économes de soins de santé toucheront la différence entre le total des remboursements dont ils ont bénéficiés et un plafond fixé à 250 euros. On imagine aisément les hésitations à se faire soigner qui vont habiter les moins nantis, particulièrement en fin d’année, afin de ne pas faire fondre cette manne financière, prix d’un report de soins dont les conséquences peuvent s’avérer lourdes. En Allemagne, il a été décidé de privatiser des soins jugés peu importants tels que la lunetterie et la dentisterie. Le mode de calcul des tickets modérateurs sur les médicaments va également alourdir la charge du patient, ici aussi la baisse des cotisations va présenter une facture sociale. La Grande-Bretagne ne fait évidemment pas exception à la libéralisation du marché de la santé. Ce pays a en effet décidé de doter les hôpitaux les plus performants d’un statut favorable à leur développement et au jeu de la concurrence. Il est à craindre que ces hôpitaux seront aussi les moins accessibles et qu’ils draineront les médecins les plus qualifiés laissant le secteur public aux prises avec les difficultés financières et les insuffisances d’offre médicale, ce qui ne devrait pas solutionner les problèmes de file d’attente qui caractérisent le NHS (9). C’est également en Grande-Bretagne que l’on généralise l’utilisation du système de crédit d’impôts pour convaincre les demandeurs d’emploi d’accepter un travail peu rémunéré (10). En France, le docteur Douste-Blazy a remplacé le docteur Mattei au chevet d’une assurance maladie apparemment frappée d’une pathologie très sévère caractérisée par une hémorragie financière de 23 000 euros par jour. Situation doublement inquiétante lorsqu’on sait que les patrons français bénéficient de réductions de cotisations sociales qui représentent un montant quotidien deux fois plus élevé. La thérapie n’a cependant guère évolué même si l’introduction d’un « dossier médical partagé » informatisé devrait permettre un meilleur suivi longitudinal des patients. Ce dossier sera également une porte à la sanction des malades qui n’adopteront pas cette forme d’échelonnement. Il est par ailleurs question d’offrir la liberté tarifaire aux spécialistes qui recevraient en consultation un patient qui ne serait pas renvoyé par un médecin traitant (11). Outre cette mesure que certains considèrent comme un élément indispensable de la responsabilisation du patient, la France appliquera des mesures traditionnelles et efficaces à court terme : déremboursements de médicaments, hausses de tickets modérateurs et révision du « panier de soins » remboursables.

Pour sauver la Sécu : soyons responsables !
L’analyse des réformes prévues ou entamées fait ressortir un concept dont le bien-fondé semble incontestable. Nombreux sont ceux en effet qui voient dans la « responsabilisation » la panacée tant attendue. C’est évidemment l’idée qui sous-tend le bonus hollandais mais elle est également à l’origine du contrat que le patient britannique devra bientôt signer avec son médecin. Ce dernier prodiguera des conseils d’hygiène de vie à un patient qui s’engagera à les suivre sous peine de se voir, en dernière limite, exclure du service de soins public. C’est également à un comportement responsable qu’invite le document de la compagnie d’assurance Swiss Re consacré aux effets néfastes, sur les profits des compagnies, du surpoids des assurés. Des effets contre lesquels les assureurs peuvent se prémunir en modulant leurs primes ou en excluant les mauvais risques (12). Une politique qui reçoit le feu vert de Test-Achat dont un représentant estime que l’on ne peut accepter une sélection fondée sur des critères que l’assuré ne peut influencer, tels que le sexe ou l’âge, mais qu’il est parfaitement acceptable que les primes varient en fonction de critères que le comportement de l’assuré peut moduler, c’est le cas pour l’usage de tabac, la pratique d’un hobby dangereux ou le fait d’accuser un surpoids. Cette volonté de responsabiliser touche aussi les chômeurs objets de contrôles et sanctions, des mesures qui ne sont pas l’apanage de la seule Belgique (13). Le gouvernement rouge-vert allemand s’est montré particulièrement sévère en faisant voter l’abaissement des allocations pour chômeurs de longue durée au niveau de l’aide sociale. Une diminution de revenu qui va toucher dès le 1er janvier 2005, deux millions de chômeurs dont on va également contrôler si le logement dont ils disposent n’est pas « trop luxueux ». Selon le gouvernement, ce traitement de choc devrait obliger les chômeurs à chercher un emploi (14). Il serait cependant utile que ceux qui préconisent de telles mesures s’imposent une réflexion profonde sur la réelle autonomie de chacun, sur les raisons pour lesquelles certains n’adoptent pas le comportement sanitairement correct, sur les obstacles qui empêchent le chômeur de longue durée de retrouver un emploi. Sans tomber dans l’excès du déterminisme complet de la condition humaine et de l’irresponsabilité qui en découlerait, nous mettons en garde contre cette tendance à renforcer l’individualisme, ferment de la méritocratie et de la marginalisation de ceux qui ne réussissent pas alors que tout semble prouver que « tout est permis et donc possible » (15). L’important gradient socio-économique qui caractérise les inégalités de santé devrait pourtant éveiller les soupçons des pourfendeurs de l’État providence et les amener à faire preuve de modestie car leur vie n’est pas, comme ils le pensent, entièrement entre leurs mains. Nous sommes aussi ce que les autres font de nous et le faible taux de mobilité sociale est plus symptomatique de la nécessité, pour les moins favorisés, de devoir prouver ce que les nantis portent comme une seconde peau que le résultat d’un manque d’ambition, de courage ou simplement d’énergie.
Et lorsque, enfin, le pouvoir se décide à agir pour promouvoir une réelle politique de santé publique, lorsqu’il est sur le point de se doter d’instruments efficaces pour conscientiser le consommateur et l’aider à adopter des comportements porteurs de santé, le lobbying capitaliste intervient pour assurer ses profits tout en feignant d’ignorer que son succès repose sur des systèmes sociaux réellement sécurisants. C’est ainsi que le Sénat français a adopté dans la nuit du 9 au 10 juillet 2004, un projet de loi sur la politique de santé publique après avoir amendé, notamment, un article relatif à la lutte contre l’obésité. Initialement l’article en question prévoyait une interdiction des distributeurs dans les lycées et collèges et d’encadrer la publicité alimentaire destinée aux enfants. Des sénateurs de la majorité n’ont pas hésité à argumenter que « ce type d’équipement participe de la mission éducative de l’établissement scolaire, en contribuant à en faire un lieu de sociabilité » (16). Finalement, les distributeurs ne seront pas interdits mais seul leur contenu devrait être réglementé et l’industrie agro-alimentaire soutenue par les chaînes de télévision a obtenu gain de cause auprès du président de la commission des affaires sociales qui préfère « responsabiliser les parents et les enseignants ». Les annonceurs pourront donc déroger à l’obligation d’assortir leurs spots d’un message sanitaire en versant une contribution égale à 1,5 % des sommes totales investies dans leur diffusion. Face à des pratiques aussi déloyales, il faut sans doute opter pour des armes adaptées comme ce pamphlet de Morgan Spurlock, ce cinéaste américain qui a réalisé un film de tous les repas qu’il a pris chez McDonald au cours d’un mois complet. À chaque fois que cela lui était proposé, Spurlock acceptait le « super size », une portion surdimensionnée de tout ce que l’on peut trouver dans ce temple de la « mal-bouffe » qui a, malgré de vives protestations, éliminé progressivement l’option « super size » et introduit un menu « Happy meal » contenant une salade et de l’eau. Comment ne pas s’indigner face à un tel manque de courage et de cohérence politiques !

Quelques pistes alternatives
Au-delà de ce constat de la prépondérance des solutions néo-libérales, il est indispensable d’apporter des contributions véritablement alternatives. Il est tout d’abord essentiel de continuer à démontrer que la sécurité sociale n’affaiblit pas les performances de l’économie mais qu’elle constitue même un facteur productif (17). Cependant, à l’instar d’Alain Euzéby (18), nous pensons qu’il faut aller plus loin et oser réaffirmer les valeurs qui fondent notre protection sociale qui est un droit reconnu explicitement dans la Déclaration universelle des droits de l’homme. Les organismes qui gèrent la protection sociale ne doivent pas hésiter à expliquer ce qui les différencie des assureurs privés et ce qui constitue leur éthique et leur identité.
Une démarche essentielle, certes, mais pas suffisante car les besoins ne cessent d’augmenter et leur satisfaction réclame des moyens financiers dont le taux de croissance ne peut se calquer sur celui de l’économie. L’assiette de financement doit donc être étendue à l’ensemble des revenus sans pour cela remettre en cause le rôle des cotisations sociales. Une contribution comme la CSG pourrait compléter le financement actuel, elle pourrait d’une part être progressive en fonction du revenu des ménages et être basée, d’autre part, sur la valeur ajoutée des entreprises.
En ce qui concerne les dépenses, le poste qui doit impérativement faire l’objet d’une maîtrise des prix et des volumes est indiscutablement celui des médicaments. Il serait absurde de contester l’utilité de tous les médicaments mais il serait irresponsable de continuer à considérer comme normal le niveau de prix de certaines molécules et, dans une certaine mesure, les quantités consommées ou en tout cas achetées, voire remboursées (19). Dans ce secteur, comme dans d’autres liés ou non à la santé, il est primordial de s’intéresser à la notion de progrès et de mener une évaluation systématique des nouveautés afin de s’assurer qu’elles coïncident réellement avec l’idée que nous nous en faisons et d’estimer, dans un second temps, le prix que la société est prête à payer pour en bénéficier (20). Le caractère financier et économique de ce prix ne doit pas évacuer ses aspects sociaux, éthiques et moraux. C’est à sa capacité de prendre en compte toutes ces dimensions que l’on peut juger des possibilités d’une société à rester démocratique.

Christian Léonard
Alliance nationale
des mutualités chrétiennes
Département Recherches et
Développement


1 Le lecteur intéressé trouvera une version plus longue et plus détaillée de cet article dans MC – Informations, N°212 – avril 2004, pp. 3 – 14, La privatisation de la protection sociale : un phénomène croissant et multiforme.
2 Voir le dernier ouvrage de Serge Halimi consacré à la montée du libéralisme. Halimi Serge, Le grand bond en arrière – Comment l’ordre libéral s’est imposé au monde, Fayard, Paris, 2004.
3 Voir Friedman Milton, Baisses d’impôts = gouvernement modeste, Le Monde, 23 janvier 2003, pp. 1 et 14.
4 Stiglitz Joseph E., Quand le capitalisme perd la tête, Fayard, 2003.
5 Voir Krugman Paul, Baisse des impôts, Le grand bluff – Qui veut la peau de l’État providence ?, Courrier International, N°673 du 25 septembre au 1er octobre 2003, pp. 36 – 41. La « bête » désigne évidemment l’État.
6 Cité par Serge Halimi, op. cit., p.22, c’est en 1848 que ces auteurs introduisent le concept de mondialisation qui aurait dû déboucher sur le renversement de la classe dirigeante.
7 Le 13 juillet 2004, la Cour de justice de Luxembourg a annulé la décision des gouvernements de suspendre les sanctions prises contre la France et l’Allemagne en raison de déficits excessifs.
8 Concernant la très complexe question du choix et des priorités en soins de santé, voir Léonard Christian, Priorités et choix en soins de santé, Dossier thématique des Mutualités Chrétiennes, N°3, octobre 2000.
9 National Health Service. Des statistiques inquiétantes tendent à montrer que la prise en charge des cancers n’est assurée dans un délai raisonnable que dans 66 % des cas.
10 Voir Adler Michael, Nouvelle approche de la sécurité sociale au Royaume-Uni : la combinaison des allocations conditionnelles et des crédits d’impôt, Revue internationale de sécurité sociale, Volume 57, 2/2004, pp. 109 - 134.
11 Voir Nau Jean-Yves, L’ordre des médecins critique la réforme de la « Sécu », Le Monde, 29 juin 2004, p.35.
12 Voir Eng Ernest, Too big to ignore : the impact of obesity on mortality trends, Swiss reinsurance Company, Zurich, 2004.
13 Les Français qui sont apparemment de plus en plus nombreux à estimer que la plupart des chômeurs pourraient retrouver un emploi s’ils le voulaient vraiment : 57 % en 1998, 68 % en 2000 et 69 % en 2003.
14 Voir Linden Marcel, Les demandeurs d’emploi en colère, La Libre Belgique, 31/07 & 01/08 /2004 p.9.
15 Voir Léonard Christian, La responsabilisation : une conséquence de l’individualisme, Revue Nouvelle, N°4, Avril 2003, pp. 68 – 73.
16 Voir Blanchard Sandrine et Girard Laurence, Le Sénat veut réduire la portée de deux mesures contre l’obésité, Le Monde, 10 juillet 2004, p. 5.
17 C’est indiscutablement l’expérience que font les entreprises qui ont délocalisé leurs productions en Afrique et qui sont confrontées à ce fléau qu’est le sida. Elles s’organisent progressivement pour mutualiser les risques et réclamer l’aide publique car, selon leurs calculs froids et presque cyniques, il est plus rentable de payer les traitements à leurs employés malades, et même aux membres de leur famille, que de subir les coûts liés à l’absentéisme et au décès d’un personnel qu’elles ont mis plusieurs années à former.
18 Euzéby Alain, Protection sociale : des valeurs à défendre !, Revue internationale de sécurité sociale, Vol. 57, 2/2004, Avril – juin, AISS, pp. 135 – 147.
19 Voir le dernier ouvrage très percutant de Philippe Pignarre, Comment sauver (vraiment) la Sécu ?, Editions La Découverte, 2004.
20 Voir Léonard Christian, Du progrès technique dans le champ d’action de la médecine, MC-Informations N° 214, Août 2004.

Moins de cotisations patronales = plus d’emplois ? Non, bien sûr...


En Belgique, on annonce un déficit pour la sécurité sociale de 1,2 milliard d’euros en 2005. Selon Rudy Demotte, ministre PS aux Affaires sociales, les réductions de cotisations patronales, si elles permettent de soutenir la compétitivité, n’ont rien à voir avec une politique de l’emploi. « Depuis Verhofstadt I, les réductions de charge ont progressé à une cadence moyenne de 16,5 % par an », expliquait-il début septembre au journal Le Soir (1). Ces réductions de charge « ne créent pas d’emploi. D’autant moins que la croissance n’est toujours pas au rendez-vous. » En attendant, cela assèche peu à peu les caisses de la sécurité sociale. Toujours selon le ministre, le manque à gagner depuis 1996 se chiffre à 4,9 milliards d’euros. Et en 2005 ? « La sécu devra se priver de 545 millions d’euros de recettes » par rapport à 2004. Et, pour éviter que la « privation » mène à une « privatisation » rampante, le ministre d’inviter patronat et syndicats à trouver, dans les six mois, les moyens de renflouer la protection sociale. L’idée d’une cotisation sociale généralisée (CSG), qui fait son retour, passera-t-elle la rampe ?
C.D.

(1) « La Sécu mitée par les baisses de charges », interview de Rudy Demotte dans Le Soir du 8 septembre 2004.