Ces derniers mois, les propos généralement entendus sur la situation en Israël et en Palestine étaient teintés d’optimisme. États-Unis, Union européenne, gouvernements occidentaux et médias ont souligné l’évolution positive du conflit : le sommet de Sharm El Sheik en février dernier aurait permis de mettre provisoirement fin à la violence ; en juin, le quartette (USA – Russie – UE – ONU) se félicitait du rapprochement observé entre les parties et y voyait une chance de paix à ne pas manquer. Dernier élément en date : le désengagement de Gaza et le démantèlement des colonies le 17 août dernier. Et pourtant...
Le désengagement de Gaza a été extrêmement médiatisé. On a montré à souhait la résistance des colons, la manifestation, le déploiement policier et militaire. Le premier ministre israélien M. Sharon a montré sa détermination et souligné les obstacles qu’il a dû vaincre. Nombreux sont ceux qui veulent y voir le commencement d’un processus menant à la fin de l’occupation et la création de l’État palestinien. D’autres espèrent à tout le moins le lancement d’une dynamique qui conduira à terme à l’évacuation de la Cisjordanie. Ces scénarios sont évidemment possibles, même si personne ne peut prévoir, avec certitude, l’évolution politique du Proche-Orient. Cependant, l’observation et l’analyse de ce qui se passe actuellement sur le terrain n’incitent guère à un tel optimisme. Au contraire. À Gaza, qu’on pouvait auparavant qualifier de prison à ciel ouvert, c’est aujourd’hui l’enfer. Sur une profondeur de plusieurs centaines de mètres de chaque côté du mur, l’armée a rasé les maisons, ne laissant le plus souvent que quelques minutes aux habitants pour évacuer… Les conditions d’entrée et de sortie de la bande de Gaza sont ahurissantes. L’immense majorité de la population n’a jamais quitté ce bout de territoire de 40 kilomètres de long et de 5 à 12 kilomètres de large. Les colonies, « protégées » par plusieurs milliers de soldats, y couvraient plus d’un tiers de la superficie, s’accaparant l’eau potable. Les colons et l’armée tiraient à vue sur tout Palestinien s’approchant un peu trop du mur. À Rafat, c’est comme Sarajevo après la guerre : maisons détruites, immeubles criblés de balles, amas de mines. Les enfants viennent vous montrer ce qu’il reste de leur maison : un amoncellement de gravats desquels apparaissent encore un cahier d’écolier, un bras de poupée, un vêtement… Maintenant que l’évacuation des colons est terminée – et c’est appréciable – Gaza risque de demeurer une prison où les conditions de vie resteront difficiles.
Le Mur
Le mur, haut de près de 10 mètres, est déjà construit sur plusieurs centaines de kilomètres ; il en fera quelque 730 quand il sera terminé. Pour l’essentiel, il est érigé à l’intérieur même des terres palestiniennes, séparant non pas les Israéliens des Palestiniens, comme cela aurait dû être le cas s’il s’était réellement agi d’une question de sécurité, mais principalement des Palestiniens d’autres Palestiniens, les paysans palestiniens de leurs champs, les écoliers et étudiants de leur école et leur université, les malades de leurs infrastructures de santé… À Jérusalem, le mur devrait parcourir 145 kilomètres et couper la ville du reste de la Cisjordanie. Qalqiliya, ville de 45 000 habitants, située près de la ligne verte, est totalement cernée ; on y entre ou on en sort par un seul goulot, contrôlé par l’armée israélienne ; 5 000 hectares de terres sont isolés des fermes, les puits sont inaccessibles, les serres ont été détruites au bulldozer, 600 magasins ont été fermés dans la ville suite à une baisse des revenus de près de 75 %… À Hébron, les Palestiniens sont contraints de tendre des filets d’acier au-dessus de leur rue pour éviter de recevoir sur la tête les ordures et détritus jetés par les quelques centaines de colons qui résident sur les hauteurs de la vieille ville. Aujourd’hui, comme pour amplifier ces actes d’un mépris incroyable, Israël s’apprête à déverser chaque mois des tonnes de déchets ménagers en Cisjordanie en provenance de la zone de Tel Aviv. Et nous pourrions multiplier les récits.
Plan global
Le retrait de Gaza ne nous apparaît pas être la première étape d’une feuille de route visant à la paix et à l’instauration d’un État palestinien. Il semble au contraire constituer la première étape d’un plan global du gouvernement Sharon dont les étapes ultérieures seront l’annexion de Jérusalem-Est, l’achèvement du mur en territoires occupés, l’annexion et la colonisation de nouveaux territoires palestiniens. À terme, l’objectif de ce plan est de rendre impossible la continuité territoriale de la Palestine et donc de vider de son sens et de toute réalité la solution de deux États. Restera le grand Israël, parsemé de quatre « bantoustans » palestiniens.
Celles et ceux qui ont suivi les débuts du processus initié par Oslo se souviennent des zones A, B, C définies dans les accords : les zones A passaient entièrement sous contrôle palestinien ; les zones B passaient sous administration palestinienne mais restaient sous contrôle militaire israélien ; les zones C enfin restaient provisoirement sous contrôle militaire et administratif israélien. Il est frappant de constater que les cartes délimitant les zones A et celles qui fixent aujourd’hui le tracé du mur se superposent parfaitement !
C’étaient déjà les mêmes stratèges militaires qui, leurs cartes dans la tête, dictaient les positions d’Israël dans les négociations d’Oslo et anticipaient cet avenir qu’on commence à entrevoir… L’observation et l’analyse des faits conduisent à un certain pessimisme. L’horizon semble bouché, la vie quotidienne des Palestiniens sera faite, longtemps encore, d’humiliation, de frustration, de privations, de brutalités, de chômage, de sang et de larmes.
Oslo a suscité un grand espoir. Il faut pourtant en convenir : il n’a pas débouché sur la fin de l’occupation, il a conduit Israël, au plus, à concéder, parcimonieusement, des bouts de territoire, pour des durées déterminées… La question des réfugiés palestiniens, centrale dans les aspirations du peuple, ne fait plus l’objet de discussion, encore moins du moindre article dans quelque presse que ce soit… Ceux qui veulent la paix au Moyen-Orient et œuvrent pour elle doivent être convaincus que seule une modification radicale dans l’ordre des priorités et des étapes du processus peut y concourir. La question centrale reste l’occupation qui se poursuit depuis 37 ans et qui s’amplifie. Il faut obtenir la fin de celle-ci pour pouvoir démarrer de réelles négociations pour une paix.
En Israël
En Israël, des voix courageuses s’expriment pour dénoncer l’occupation et ses dégâts. Quelques centaines, quelques milliers peut-être, de jeunes Israéliens refusent de faire leur service militaire et de servir dans les territoires occupés. Certains sont poursuivis ; les plus « connus » d’entre eux sont ignorés de la Justice qui craint sans doute les effets négatifs de procès politisés et médiatisés. Ce mouvement est symboliquement important ; il est cependant encore marginal. Sera-t-il capable de faire tâche d’huile et de se transformer en refus massif ? Rien n’est moins sûr. À la veille du désengagement programmé de Gaza, on a observé plutôt avec crainte et perplexité le refus de jeunes soldats, travaillés par le lobby des colons et les rabbins extrémistes, d’obéir aux ordres de faire évacuer les colonies de Gaza…
Le forum des familles endeuillées, rassemblant Israéliens et Palestiniens ayant perdu un membre de leur famille au cours d’attentats suicides ou d’actions de représailles de l’armée ou de tirs de colons, développe une action remarquable. Il multiplie les opportunités de contacts entre les deux peuples. En une année, près d’un million de contacts téléphoniques ont ainsi été établis entre Palestiniens et Israéliens, inconnus les uns des autres, pour parler, échanger…
Dans la communauté juive, de grandes voix – dont celle du grand rabbin de Londres – en appellent à un sursaut moral d’Israël, au nom même des valeurs fondamentales du Judaïsme, et mettent en doute le sionisme comme projet politique. Tous ces résistants traduisent l’espoir qu’il est possible de sortir de l’engrenage de la haine et du rejet de l’autre. Tout cela est appréciable. L’éthique et la politique sont des champs distincts. La probabilité que les actes posés ne conduisent pas à la fin de l’injustice ne dispense pas d’agir selon sa conscience. Celles et ceux qui posent ces actes à partir d’une opinion éthique savent que ceux-ci ne changeront pas, à court et moyen termes, la distribution des forces. Ils agissent malgré tout, non seulement pour être en paix avec leur conscience, mais par solidarité. De ces actes et de leur résonance dans la société israélienne naîtra peut-être un jour un nouvel espoir politique.
Cependant, pour l’heure, leurs effets sur les rapports de force à l’intérieur de la société israélienne sont bien faibles. Le mouvement de la paix est en phase de dégénérescence profonde. Ultraminoritaire, il ne pèse plus réellement sur l’agenda politique. Pire : la plupart de ses dirigeants et partis proches ont renoncé et se sont ralliés au discours dominant : « Nous n’avons plus de partenaire pour faire la paix ! ». Au niveau politique, la situation n’est guère plus brillante. La gauche non sioniste est d’une faiblesse extrême. Du parti travailliste, on ne voit émerger aucun véritable leader susceptible de relancer une dynamique et de rallier une majorité sur une politique véritable de désengagement.
Du côté palestinien
Le mouvement national palestinien semble lui aussi dans une période de creux et d’affaiblissement. Son histoire fut parsemée d’obstacles, de crises profondes et dangereuses. Il est né dans le contexte d’un panarabisme resté sans lendemain. La raison d’État est en effet demeurée, dans tous les pays arabes, le critère ultime des politiques. Chacun d’entre eux a essayé d’instrumentaliser la question palestinienne à son propre profit. Il s’ensuivra un certain émiettement du nationalisme palestinien : début des années 70, on ne comptera pas moins d’une dizaine d’organisations dont une majorité était contrôlée et manipulée par l’un ou l’autre État arabe. Il aura fallu toute la détermination et la ruse de Yasser Arafat et des principaux dirigeants du Fatah pour consolider une certaine unification du mouvement à travers l’OLP.
Sa liberté idéologique, son aptitude à négocier et à établir de bonnes relations avec les autres leaders arabes en feront très vite le leader central qui pourra imposer peu à peu sa politique et sa stratégie. Malgré cela, il faut reconnaître que le mouvement national palestinien s’est parfois bercé d’illusions sur la solidité de la solidarité des régimes arabes. Il a parfois fait preuve d’un excès de verbalisme, d’un manque de réalisme dans l’appréciation des forces en présence, d’une certaine méconnaissance de l’Occident et des mentalités de l’adversaire et des alliés potentiels.
Un moment tentée par l’option militaire, sa direction a dû se résoudre à en acter son importance réduite et qui n’a jamais véritablement dépassé le stade d’opérations de commandos. Malgré ces faiblesses, il aura réussi, de façon éclatante à faire beaucoup de bruit sur le plan médiatique. L’origine européenne d’une majorité d’Israéliens, le poids historique, culturel et religieux d’Israël et de la Palestine dans les sociétés occidentales et pour le monde musulman, conjugué aux actions de « terrorisme publicitaire » (qui fut dans les années 70 une des modalités d’action des Palestiniens) auront réussi à inscrire la question palestinienne à l’agenda politique et diplomatique international.
1987 et le déclenchement de la première Intifada marqueront un tournant décisif dans la lutte du peuple palestinien et feront franchir à celle-ci un saut qualitatif fondamental. Jusque-là et pendant 20 ans, animée de l’extérieur par l’OLP et quelques autres organisations n’en faisant pas partie, la question nationale palestinienne est désormais prise en charge de l’intérieur des territoires occupés, par une génération de jeunes ayant grandi sous l’occupation et connu l’installation des colons israéliens. De plus en plus, à partir de là, les Palestiniens seront perçus comme les victimes par une part significative de l’opinion occidentale. Enfin, son caractère populaire, massif et ses modalités d’actions lui donnent une efficacité jamais connue jusqu’alors. En effet, l’armée israélienne va se montrer incapable d’y faire face et de briser la révolte. Sa façon de réagir (« brisez-leur les jambes » ordonnait Rabin) va ternir son image déjà écornée par la guerre du Liban. Face à une répression féroce, cette Intifada ne s’est pas essoufflée. Elle aura contribué de façon décisive à la reconnaissance du fait national palestinien et à celle de son représentant légitime : l’OLP. C’est elle qui permet l’émergence des négociations de Madrid puis celles, secrètes, d’Oslo. Les accords qui s’y dégagèrent et le processus qui en découlait devaient amener à la paix et à la reconnaissance de l’État palestinien.
Enlisement
On connaît la suite. Le processus s’est enlisé et a tourné court. Après l’assassinat de Rabin et le court intermède du gouvernement Pérès qui aura fait tout ce qu’il fallait pour perdre les élections, Netanyahou, Barak et Sharon se sont évertués à étouffer le processus d’Oslo. Or, la décision stratégique d’Arafat de s’engager dans cette voie pouvait s’avérer payante à la condition que le processus se déroule au rythme prévu. Son enlisement rapide et son agonie font se re-poser avec acuité la question de savoir s’il est possible d’à la fois gérer une autorité palestinienne ne disposant que de peu de pouvoir réel sur des bouts de territoires « concédés » à certains moments et de poursuivre une lutte de libération nationale loin d’être terminée.
Certains Palestiniens et non des moindres se posent la question et se demandent s’il ne vaudrait pas mieux « remettre les clés aux Israéliens » plutôt que de continuer une mission impossible et de se discréditer auprès de son propre peuple ! On voit mal la direction palestinienne en arriver là. Mais à lui seul, le fait que la question s’exprime est une indication sur l’état d’esprit qui prévaut chez les Palestiniens.
Car en effet, quelques mois après la mort de Yasser Arafat, l’état du mouvement palestinien est préoccupant. Le Fatah, principal parti composant l’OLP, est affaibli, discrédité dans une partie significative de l’opinion palestinienne. Un grand nombre de ses meilleurs cadres ont été éliminés ou croupissent dans les prisons israéliennes. Il est accusé de clientélisme, voire de corruption. Il peine à surmonter les contradictions entre direction des territoires occupés et palestiniens de l’intérieur, d’une part, et direction de l’extérieur et réfugiés, de l’autre. Contradictions qui s’expriment entre autres par les conflits entre les « anciens » (de Beyrouth, Tunis) et la nouvelle génération émergeant des territoires. La résolution de cette contradiction est pourtant essentielle pour l’avenir du mouvement national palestinien, tant parce que la situation en Cisjordanie et Gaza est précaire qu’à cause du nombre considérable de Palestiniens réfugiés à l’extérieur pour qui l’aspiration au retour reste une volonté prioritaire.
Le conflit politique s’est notamment exprimé lors des élections présidentielles pour la succession d’Arafat. Marwan Bargouthi, leader du Fatah en Cisjordanie, en prison israélienne, avait accepté de retirer sa candidature à la présidence de l’Autorité palestinienne au terme d’un compromis avec Mahmud Abbas qui devait consacrer, lors du congrès du Fatah en septembre 2005, la montée en puissance de la jeune génération des cadres. Les élections législatives palestiniennes devaient se tenir en juillet de cette année. Leur report, justifié officiellement par l’évacuation de Gaza, peut probablement aussi s’expliquer par les mauvais résultats du Fatah face au Hamas lors des municipales de mai dernier et par cet enjeu interne au Fatah. Le Fatah, le mouvement national palestinien et sa direction politique seront-ils capables de redresser la situation, de retrouver un ancrage profond et durable dans la société ? Il devra pour cela se montrer capable de définir et de mettre en œuvre une véritable stratégie de confrontation de masse, et non violente, susceptible de redonner courage au peuple, de réaffirmer la légitimité de son combat dans l’opinion publique internationale et dans une partie significative de l’opinion israélienne et de créer un rapport de force enfin plus favorable aux dirigeants chargés de négocier avec le gouvernement israélien.
Aux yeux de nombreux leaders palestiniens, cette tâche est vitale et urgente. Ils sont conscients qu’ils devront, pour y arriver, à la fois relancer une dynamique de lutte populaire, marquer des points significatifs dans l’amélioration des conditions de vie quotidienne de la population et mettre hors d’état de nuire les groupuscules armés et les fanatiques qui poussent aux attentats suicides qui ont causé des désastres majeurs à la cause palestinienne.
Communauté internationale
La communauté internationale, de son côté, a totalement failli à ses obligations sur la résolution du conflit. Jamais l’histoire n’aura montré une telle complaisance des États qui pèsent dans l’arène internationale à l’égard de la politique de force cynique de l’État d’Israël. Les résolutions de l’ONU restent sans suite ; les États qui, pourtant, ont voté la résolution des Nations Unies reprenant les conclusions de l’Arrêt de la Cour internationale de Justice (09-07-2004) n’en tirent pas les conséquences et n’adaptent pas leur politique à l’égard d’Israël. La politique du gouvernement israélien, si elle était menée par tout autre État, serait dénoncée en Occident et particulièrement aux États-Unis. Des sanctions lourdes seraient prises, voire plus… Rien de tout cela, on continue à faire bonne figure en prônant l’équidistance et le parallélisme.
Il faut ajouter à cela le recul de la sensibilisation à la question palestinienne dans les opinions publiques occidentales. Les attentats de septembre 2001 aidant, les amalgames facilement faits avec les « terroristes » palestiniens, le lobby sioniste s’est ressaisi et mène une véritable action de désinformation auprès des médias et de nos opinions publiques. Dans ce contexte, le mouvement de solidarité internationale doit se fixer comme tâche première de regagner les opinions publiques, de témoigner, de dénoncer mais aussi d’éclairer sur la situation véritable et son évolution. Il doit aussi se montrer capable de transformer en conscience, en acte et en force politique cette conscientisation et de peser réellement sur nos gouvernements et l’Union européenne. Héritier des principes de solidarité internationale, d’entraide entre les peuples, le mouvement ouvrier a une responsabilité particulière dans le rapport de force à construire. Il doit l’assumer. Contre les raisons d’État et les logiques politiciennes et électorales qui sont au fondement des pratiques des gouvernements occidentaux, il nous revient de réactiver la raison solidaire. Le rapport de force étant tellement disproportionné, le peuple palestinien ne pourra se libérer de l’occupation israélienne et construire son État sans la solidarité efficace des forces progressistes des pays occidentaux et particulièrement européens. Les combats pour le droit, la liberté du peuple, l’égalité ont toujours été longs et difficiles ; il n’en sera pas autrement pour celui-ci.
Témoignage
Nous sommes plusieurs à nous rendre régulièrement en Palestine et Israël. Ces derniers temps, beaucoup nous disent : « Quels changements là-bas ! Cela va enfin mieux ! Les attentats ont pratiquement disparu. » Etc. À chaque fois, nous devons répondre : « Non, cela ne va pas mieux. Au contraire, cela va de mal en pis ! Car l’agression israélienne, si elle se fait de plus en plus discrète, ne cesse de s’accentuer. » « Quelle agression israélienne ? ». Nous en voyons au moins quatre : le Mur, les implantations, les incursions et les prisons.
D’abord le Mur, l’affreux Mur qui, jour après jour, inexorablement, continue à se construire. Il morcelle la Palestine, sépare ses habitants, arrache des terres. Un sommet dans le genre : le Mur qui coupe dans le sens de la longueur la grand-route Jérusalem-Ramallah. Sur une douzaine de kilomètres. Une route bordée des deux côtés de quartiers palestiniens ! Le Mur qui « protège » Israël est construit à 97 % à l’intérieur des terres palestiniennes !
Les implantations continuent, elles aussi. Il y a quelques mois, M. Bush interdisait à M. Sharon d’agrandir de 4 500 maisons l’immense colonie Maale Adumim, à l’Est de Jérusalem, en pleine Palestine. Il y eut des discussions serrées, paraît-il. Mais au même moment, de nouvelles implantations continuaient à naître aux quatre coins de la Palestine. Avec de nouvelles routes pour y conduire, prises elles aussi sur le maigre territoire palestinien…
Les incursions, le plus souvent nocturnes, de l’armée israélienne au cœur de villes comme Naplouse, Qalqilya et d’autres, sans le moindre mandat officiel, « pour y arrêter des activistes du Hamas ». Comment vivre dans un tel climat d’insécurité puisque l’armée israélienne se donne le droit de pénétrer partout en Palestine ? Enfin, les prisons. Il y a bien eu quelques centaines de libérations… sur un total de plus 8 000 prisonniers palestiniens, femmes, hommes et… enfants ! Contrairement à la 4e Convention de Genève (signée par Israël), ces prisonniers sont enfermés dans des conditions dégradantes, sans procès, sans avocats, sans durée prévue de détention. Ils n’ont droit qu’à des visites espacées, d’un seul membre de leur famille à la fois. Le Mur, les implantations, les incursions, les prisons… Tout ceci est grave, infiniment grave. Mais il y a plus grave encore : le silence des nations, de la communauté internationale, des partis démocratiques, des organisations sociales, des Églises.
Henri Weber