Bien que l’emploi soit proclamé « priorité politique n°1 », plus de 350 000 personnes en sont privées à Bruxelles et en Wallonie. L’emploi de qualité est une, voire la principale, voie d’accès à l’intégration sociale, à un revenu décent. À cet égard, tous les pouvoirs publics peuvent et doivent jouer un rôle, la commune et la province aussi. Le développement de l’activité économique n’est donc pas un but en soi, mais il permet particulièrement de maintenir ou développer l’emploi, ainsi que les moyens de la vie locale, via la fiscalité.

Le développement économique n’apparaît pas directement comme un domaine d’action des pouvoirs locaux. Sous l’angle des budgets, par exemple, l’activité économique représente plutôt une recette pour les communes (environ 50 euros par habitant), en raison des dividendes apportés par les intercommunales. Cela étant, en raison de la situation de l’emploi et des problèmes croissants en matière de mobilité, il est évident que les communes ne peuvent se limiter à l’aspect « recettes » du développement économique : elles ont aujourd’hui un rôle important à jouer dans la création d’emploi local, tant par leur propre rôle d’employeur, que par l’effort qu’elles doivent faire pour aménager des conditions optimales en vue d’accueillir l’activité économique. Les communes se sont associées en intercommunales spécialisées dans le développement économique. Les conseils communaux ou conseils consultatifs locaux débattent trop rarement des orientations prises dans ces organismes. L’information des citoyens est insuffisante, notamment parce qu’il y a un système de cascade dans les représentations. Les conseillers communaux sont élus directement, puis désignent les représentants de la commune dans ces organes supra communaux. Il est rare que ces mandataires soient interpellés par ceux qui les ont désignés.

Croissance

L’activité économique s’est développée entre 1995 et 2003 au rythme de 2 % par an en Belgique. Dans les communes de la Région bruxelloise, l’évolution est en moyenne de 2 % également. En Wallonie par contre, la croissance est plus faible : 1,64 %. La situation wallonne n’est pas homogène. Le Brabant wallon connaît une croissance de plus de 3 % par an. Par contre, les bassins de Liège et Charleroi, qui concentrent 30 % de la population wallonne, ont vu les activités économiques augmenter de moins de 1 % par an. Le nombre d’emplois salariés a augmenté également, tant en Wallonie (+70 000) qu’à Bruxelles (+45 000) entre 1996 et 2002. L’emploi a diminué dans l’industrie, a augmenté dans les services marchands, mais surtout dans les services non marchands et les administrations. L’augmentation du nombre d’emplois est en grande partie liée au développement de l’emploi à temps partiel. En Flandre, par contre, l’emploi privé s’est développé au même rythme que l’emploi public et non marchand durant cette période. Le chômage a connu une période de légère diminution, entre 1996 et 2001, (-10 000 en Wallonie et – 5 000 à Bruxelles), puis une période d’augmentation continue. Le nombre de personnes sans emploi et le nombre d’emplois peuvent augmenter en même temps. C’est le cas lorsque la population active, c’est-à-dire qui souhaite travailler, augmente plus rapidement que les emplois disponibles. À Bruxelles, joue également le fait que le nombre de navetteurs provenant des autres régions augmente.
La taille de la commune a une influence sur son rayon d’action en matière économique. Une petite commune rurale peut élaborer des programmes axés sur le terroir, le tourisme, la valorisation des ressources locales, le commerce, l’artisanat. Une commune plus importante peut agir sur des éléments contribuant à son attractivité : enseignement, mobilité, rénovation urbaine, espaces industriels et de bureaux, etc. Le pouvoir local a un rôle important en termes d’aménagement du territoire, d’urbanisme. Il peut favoriser l’accueil de certaines activités économiques ou au contraire les freiner, les orienter ailleurs. Il a aussi une responsabilité dans la durée de la procédure, dans la qualité des dossiers, dans la consultation de la population, pour les mesures compensatoires éventuelles aux nuisances créées.
Les communes et provinces sont des clientes significatives, tant pour les biens ou services que pour les investissements. Près de la moitié des investissements publics belges (routes, bâtiments, infrastructures,…) est aujourd’hui réalisée par les pouvoirs locaux. Une politique d’achat ou d’investissement judicieuse permet, en respectant une certaine dose de saine concurrence, de favoriser des activités plus locales, plus équitables ou plus durables. Les communes ont en outre accès à des mécanismes régionaux destinés à favoriser le développement local, comme les agences de développement local, les animateurs urbains, etc. Quelques évolutions qui peuvent être significatives se sont produites en Wallonie.

- Du côté des intercommunales : les intercommunales sont soumises à des règles censées développer la transparence et l’information à l’égard des conseils communaux. Un processus de rationalisation du nombre d’intercommunales a été lancé. Dans le domaine du développement économique, cela pourrait toucher le Hainaut. Pour les autres communes, les intercommunales de développement économique correspondent au territoire provincial. La Région octroie aux pouvoirs locaux des moyens humains pour développer des activités, augmente leur autonomie en matière d’aménagement du territoire. Les intercommunales de développement économique jouent un rôle important dans l’aménagement actif du territoire pour les activités marchandes. Elles évoluent pour prendre mieux en compte le développement des PME (hall relais…) ou les services complémentaires (accueil des enfants, mobilité, restauration…). Des progrès restent à faire en matière de publicité des débats lorsque des orientations sont prises (exemples : complexe commercial à Namur, équipement des zones prioritaires, etc.).

- Du côté des impôts communaux : certaines communes, mais surtout les provinces, conservent des taxes qui pénalisent l’investissement, voire qui compensent des exonérations octroyées par la Région (exemples : la taxe sur la force motrice, la taxe industrielle compensatoire). Celle-ci a décidé d’en supprimer une grande part (plan dit « Marshall »).

- Concernant les agences de développement local : les agences de développement local et autres mécanismes au service du développement des activités des villes et communes ont jusqu’à présent donné peu de résultats. La procédure d’octroi et de suivi devrait objectiver les choses et permettre une évaluation. Jusqu’à présent, certaines agences étaient plus au service de certains élus (échevins, bourgmestres) que du développement local.

- Les achats et investissements des communes : les politiques d’achat ou d’investissement semblent faire l’objet de peu de communication. Or, il s’agit d’un levier intéressant, tant sur le plan économique, social qu’environnemental. Elles gagneraient à être stimulées par l’Union des villes et communes ou l’administration régionale.

Des pistes pour des revendications

Sans être le principal responsable de la vie économique et de la promotion de l’emploi, la commune peut toutefois jouer un rôle non négligeable à cet égard, en créant un climat favorable au développement économique, dans le souci d’offrir de l’emploi à celles et ceux qui en sont privés et dans le cadre du développement durable. Le MOC attend donc des communes qu’elles contribuent à l’effort collectif qui doit être fait pour permettre à chaque citoyen(ne) d’accéder à un emploi de qualité. Quatre pistes doivent être particulièrement explorées :
- chaque commune, ou groupe de communes pour les plus petites, doit organiser au moins tous les deux ans un débat public sur l’action de l’intercommunale de développement économique à laquelle elle est affiliée. En outre, les ordres du jour et rapports devraient être transmis et discutés dans les Conseils communaux ;
- les communes qui ont mis – ou comptent mettre – en place des agences de développement local doivent préciser leurs missions et assurer un suivi et une évaluation régulière de leurs actions. Celles-ci doivent réellement viser le développement des activités et des petites entreprises, en tenant compte des inégalités d’accès au marché du travail ;
- les communes doivent aussi réfléchir très consciencieusement à leurs achats et leurs investissements. Tout en respectant une concurrence « loyale », elles doivent poursuivre un objectif de développement durable en incluant des clauses sociales et environnementales et en choisissant le rapport qualité-prix plutôt que le prix seul ;
- enfin, les communes ont évidemment, particulièrement pour les plus importantes, une responsabilité essentielle dans la création directe d’emploi. Par exemple, Bruxelles et les grandes villes wallonnes comptent parmi les plus gros employeurs, surtout lorsqu’on y intègre les institutions paracommunales (CPAS).

Le Gavroche

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